
Qu’est-ce que Lentille ?
Il s’agit essentiellement d’un jeu de rôle intégré à une application d’édition d’images. Une fois que vous avez téléchargé vos 10 à 20 photos LentilleLa fonctionnalité Magic Avatar, ajoutée en novembre, est chargée de les reconfigurer à l’aide de l’intelligence artificielle (IA) et de créer des versions fantasmagoriques : un astronaute, un guerrier du jeu vidéo, un personnage animé, etc.

IMAGE DU COMPTE INSTAGRAM @JENNIFERLOVEHEWITT
La comédienne Jennifer Love Hewitt a partagé des photos de l’application Lentille.
“Nous avons traversé le mur”
Nous sommes habitués aux applications gratuites qui collectent et utilisent nos données. Le professeur Jonathan Bonneau de l’École des médias de l’UQAM le pense Lentille, qui n’est pas gratuit, nous avons « franchi le mur ». les conditions d’utilisation stipulent que l’application utilise des photos fournies par l’utilisateur pour améliorer son algorithme, qu’elle est propriétaire des images créées et se réserve le droit de les réutiliser. “Le client paie pour fournir à l’entreprise des données de performance et d’entraînement à l’IA”, résume-t-il. Nous payons également leur publicité. »

PHOTO Alain ROBERGE, Presse
Jonathan Bonon, professeur à l’École des médias de l’UQAM
Exposition portrait… mais de quoi ?
la popularité de Lentille a explosé ces dernières semaines, tout comme les critiques qui lui sont adressées. De nombreux utilisateurs constatent que les avatars créés par l’application sont souvent plus “sexy” que les photos présentées : seins gonflés, parties du corps dénudées, expressions plus sensuelles, etc. Les utilisateurs d’ascendance africaine rapportent que Lentille tend à faire pâlir leur peau, ce que Jonathan Bonneau appelle « le racisme algorithmique ». Ces réflexes d’application peuvent être attribués aux préjugés conscients ou inconscients de ses développeurs, convient-il. Cependant, les utilisateurs jouent également un rôle. « Le simple fait de cliquer spontanément sur quelque chose selfies plutôt que d’autres, juste par curiosité, il dit à l’application que cette image attire l’attention, explique-t-il, et trompe son algorithme pour qu’il continue à recommander le même type d’image. »

IMAGE DU COMPTE INSTAGRAM @MEGANFOX
Image de Megan Fox prise par l’application Lentille
Lentille formés à partir d’images déjà disponibles sur le web, qui sont un univers biaisé. Tapez simplement “grand-père” ou “femme guerrière” dans Google pour le voir ; les images proposées sont majoritairement de Caucasiens, et les guerriers portent majoritairement cette « armure de bikini » populaire dans les jeux vidéo. “Ce que nous voyons Lentillec’est un côté d’Internet qui n’était peut-être pas visible pour tous les utilisateurs, mais l’intelligence artificielle revient au premier plan », suggère-t-il.
Drapeau rouge?
L’une des préoccupations causées par la popularité Lentilleest que cette application peut contribuer à la création de fausses images et notamment à l’exposition à la pornographie (vengeance porno) “Plus la technologie est facile à utiliser, plus il y aura de gens qui l’utiliseront à de bonnes et de mauvaises fins”, déclare Philippe Baudouin, président de la société d’intelligence artificielle Waverly, tout en soulignant que les outils d’imagerie ; les tricheurs étaient déjà disponibles avant Lentille. Cela ne l’empêche pas de croire à la nécessité d’imposer un cadre réglementaire aux candidatures. Il demande également un meilleur contrôle sur les utilisateurs, qui peuvent ainsi ajuster les outils qu’ils utilisent et lutter, en quelque sorte, contre la standardisation stéréotypée imposée par une telle application. Lentille. “L’idée n’est pas de laisser l’IA prendre toutes les décisions que l’utilisateur peut prendre tout seul”, juge-t-il.

PHOTO ROBERT SKINNER, PRESSE
Philip Baudouin, président de Waverly Technology
Un pas de plus vers la métaversion
avatars créés avec Lentille sont un outil supplémentaire pour « sortir du réel », estime Philippe Baudouin. « Avec l’arrivée du métaverse, qui emprunte beaucoup aux codes du jeu vidéo, on va vers une individualisation accrue. On a envie de se montrer sous son plus beau jour, comme on le fait déjà sur les réseaux sociaux, analyse à son tour Jonathan Bono. Nous allons nous scanner, nous améliorer et voyager vers la métaversion dans l’espoir d’avoir, dirons-nous, des vies complémentaires. »
Questionner nos pratiques
Avec la multiplication des filtres et des applications de retouche d’images, Philippe Baudouin estime que les internautes ont un sens plus critique qu’auparavant face à des images idéalisées comme celles qu’il a créées. Lentille. “Les jeunes d’aujourd’hui ont ces applications sur leurs téléphones, ils savent qu’ils peuvent utiliser des filtres et imaginer que tout le monde autour d’eux fait la même chose”, note-t-il. Ça n’évite pas les problèmes d’image ou de perception de soi, mais on peut au moins avoir une conversation et comprendre que c’est un univers fictif. “TikTok et Facebook font bien pire que Lentille avec nos données personnelles », reconnaît d’emblée Jonathan Bono. Ce qui n’est pas une raison pour ne pas être surpris, ajoute le professeur de l’UQAM. “Vous pouvez mettre votre visage sur Internet, nous le faisons déjà sur les réseaux sociaux, et si nous ne l’envoyons pas, des entreprises comme Lentille sont capables de les prendre, dit-il. La discussion proprement dite est la suivante. quelle photo gardez-vous privée ou réservez-vous à un groupe limité d’amis ? »