
L’industrie francilienne est en phase de reprise après la crise du Covid, et fait désormais face à la crise de l’énergie qui suscite beaucoup d’incertitudes et donc d’inquiétudes pour les chefs d’entreprise. Bruno Berthet, le patron du GIM (Groupement des Industries Métallurgiques), qui regroupe la grande majorité des entreprises des industries métallurgiques et technologiques d’Île-de-France, demande à l’État l’arrêt du bouclier tarifaire, un peu comme cela fait pour les maisons.
Quel est l’état de santé de l’industrie d’Ile-de-France, après l’épreuve du Covid ?
On oublie souvent que l’Île-de-France reste la première région industrielle de France. 10% du PIB de la région est fourni par l’industrie. Dans notre groupe, qui concerne 2 000 entreprises et 275 000 emplois, la moitié d’entre elles sont des PME de moins de 50 salariés. Dans l’ensemble les fondamentaux sont bons, le secteur recrute… C’est l’un des enjeux de la semaine de l’industrie en ce moment, faire mieux connaître nos métiers. Pendant la crise du Covid, les mesures de secours ont été massives et efficaces : nous avons eu un taux de défaillances d’entreprises exceptionnellement bas. Mais la situation reste fragile : les PGE (prêts garantis par l’Etat) ne sont toujours pas tous remboursés, par exemple. Il y a encore des délais.
Quel est l’impact pour les entreprises de la hausse des prix de l’énergie ?
Alors que la facture d’électricité ou de gaz représentait 1% du chiffre d’affaires l’an dernier, aujourd’hui elle est multipliée par quatre ! Certains fournisseurs qui proposaient des prix bloqués ont eux-mêmes mis fin aux contrats. Pour certaines entreprises, la facture est multipliée par dix. Et les marges ne sont pas extensibles. Même si l’entrepreneur sait s’adapter, c’est une de ses caractéristiques, ces variations brutales sont difficiles à absorber. Et nous n’avons aucune visibilité pour l’avenir.
L’énergie a été l’un des rares atouts de la France par rapport à ses concurrents, avec des coûts d’électricité et de gaz abordables par rapport à nos concurrents. Ce n’est plus du tout le cas, surtout par rapport aux Etats-Unis ou à l’Asie qui ne subissent pas ce choc énergétique. Seule l’Europe a été touchée par cette crise énergétique, qui s’est traduite par une concurrence faussée.
Les entreprises peuvent s’adapter…
Cette crise peut être l’occasion d’un modèle de production plus sobre. En chinois, l’idéogramme signifiant crise est composé des mots danger et opportunité. L’industrie était déjà engagée dans cette voie plus sobre, il est très souhaitable d’aller vers plus de sobriété énergétique. Mais il faut comprendre qu’il faut deux ans pour changer de moteur, par exemple. Et les chefs d’entreprise sont inquiets, ce qui ne facilite pas les décisions d’investissement. L’autre solution est de réduire la production, mais il y aura alors un impact sur l’emploi. Et nous ne voulons pas entrer dans cette spirale descendante. Enfin, il y a une dynamique de réindustrialisation du pays, elle ne devrait pas être brisée par cette crise énergétique.
Que demandez-vous à l’Etat pour atténuer les effets de cette hausse des prix ?
Si les mesures pour les familles sont nécessaires, ne pas en prendre pour les entreprises aura forcément un impact sur celles-ci.Je demande que les mesures de chômage partiel, qui ont été très efficaces pendant le Covid, soient prolongées. Mais le plus important serait de pouvoir garantir un prix maximum pour le gaz et l’électricité. C’est une négociation qui se déroule au niveau européen.