
La Tunisie paie aujourd’hui le prix fort d’un lourd héritage qui nuit aux intérêts économiques et budgétaires de l’Etat mais aussi à ceux du contribuable. Si le gouvernement Bouden est victime d’une situation économique extrêmement difficile, il est encore tenu d’ouvrir de grands chantiers, dont notamment l’intégration de l’économie parallèle.
En Tunisie, le secteur informel est tellement développé que son volume d’échanges est équivalent ou presque à celui du secteur reconnu. Cette situation remonte à des décennies, lorsque les activités de contrebande et les opérations illégales étaient en quelque sorte autorisées par les autorités pour préserver la paix sociale dans certains gouvernorats pauvres.
Aujourd’hui la Tunisie paie au prix fort ce lourd héritage qui nuit aux intérêts économiques et budgétaires de l’Etat mais aussi à ceux du contribuable. Si le gouvernement Bouden est victime d’une situation économique extrêmement difficile, il est encore tenu d’ouvrir de grands chantiers, dont notamment l’intégration de l’économie parallèle.
Pour les économistes, le moment est en effet venu d’ouvrir ce dossier qui fragilise l’équilibre financier de l’Etat et constitue un manque à gagner chronique de recettes fiscales.
C’est dans ce contexte que le gouvernement a annoncé la couleur de son plan pour y remédier. Nasreddine Nsibi, porte-parole du gouvernement et ministre de l’Emploi et de la Formation professionnelle, a présenté un projet de décret qui permet l’insertion des travailleurs informels dans le secteur formel qui sera porté devant un Conseil ministériel.
Il a souligné dans ce sens que le décret prévoit des subventions visant à intégrer ces travailleurs dans les circuits économiques reconnus. « Les dispositions du projet de décret prévoient le versement de subventions pendant une période de deux ans à tout travailleur du secteur informel, afin de l’accompagner dans le processus de son insertion dans le cycle économique formel »il expliqua.
Cela s’inscrit dans le cadre d’une réforme majeure visant à mettre fin aux formes d’économie parallèle. Dans le cadre de ces nouvelles dispositions, l’État prendra également en charge les cotisations sociales des travailleurs informels qui décident d’intégrer l’économie formelle sur une période de deux ans et s’emploieront à préserver leurs revenus.
Selon le gouvernement, une fois mise en place, cette mesure générera d’énormes recettes fiscales pour l’Etat tant que toutes ces activités échapperont totalement à tout contrôle fiscal.
Situation hors de contrôle !
Constatant que cette situation est devenue incontrôlable, le ministre des affaires sociales, Malek Zahi, a estimé que le nombre de travailleurs du secteur informel en Tunisie est estimé à 1,6 million.
Zahi, qui citait une étude réalisée par l’Institut national de la statistique (INS) l’année dernière, en collaboration avec le ministère de l’Emploi et de la Formation professionnelle, a indiqué que 36% de la main-d’œuvre active en -Tunisie travaille dans le secteur informel, ajoutant que les travailleurs de ce secteur souffrent d’une rémunération insuffisante et dépassent les heures de travail imposées par la loi.
Les différents économistes, mais aussi les bailleurs de fonds tunisiens, ont toujours mis en garde contre le poids de l’économie parallèle en Tunisie.
Le président de l’Union des banques du Maghreb, Ahmed Karam, a souligné dans ce sens l’importance de l’impact de l’économie parallèle sur la situation financière de la Tunisie.
“Actuellement, l’économie parallèle coûte 16,5 milliards à l’Etat”, selon ses mots. Le responsable a appelé à la nécessité de travailler avec tous les acteurs du domaine économique et financier pour élaborer une stratégie nationale qui travaille à intégrer les travailleurs du secteur informel dans le secteur formel.
Pour sa part, l’Institut tunisien d’études stratégiques (ITE) considère que le deuxième obstacle majeur à la relance économique en Tunisie est la concurrence inégale à laquelle sont confrontées les entreprises structurées de la part de leurs homologues non formelles.
Selon une étude présentée par Ites, et réalisée par la Banque mondiale en 2021, l’économie parallèle en Tunisie attire 41,5% de la population active, soit 1.453.620 citoyens, dont 87,6% sont des hommes.
Ce secteur informel attire également 53,7% de la majorité des hommes tunisiens, contre 21,5% des femmes actives.
Environ 55% des personnes travaillant dans le secteur informel n’ont pas poursuivi leurs études au-delà de l’école primaire, contre 25% dans le secteur formel.
Plus de forfait ?
Dans cette guerre contre l’injustice fiscale, le gouvernement a également annoncé de nouvelles dispositions qui accompagneront la loi de finances pour l’exercice 2023. En effet, le ministère des Finances a publié un arrêté qui fixe la liste des activités exclues du régime du forfait.
Les nouvelles dispositions s’appliqueront à compter du 1euh Janvier 2023. En effet, les activités industrielles telles que la fabrication de béton prêt à l’emploi, la coupe de marbre, la fabrication de produits de quincaillerie, etc. seront exclues de cette activité et devront donc s’acquitter de leurs impôts selon le régime réel.
Il en va de même pour le commerce de véhicules de transport d’occasion, le commerce de matelas et de mousse, la vente de fruits secs, les supérettes, etc.