
Les responsables talibans ont ordonné aux ONG de cesser de travailler avec les femmes après de “graves plaintes” selon lesquelles elles ne respectaient pas un code vestimentaire approprié. “Choquée”, la Suisse a demandé aux talibans de revenir sur leur décision.
Dans une lettre obtenue par l’AFP, le ministère chargé d’approuver les licences des ONG travaillant en Afghanistan a déclaré : “Le hijab islamique et d’autres réglementations liées au travail des femmes dans les organisations nationales et internationales. De graves plaintes de non-conformité ont été reçues”. Le porte-parole du ministère a confirmé que le ministère de l’Économie avait envoyé l’ordre aux ONG.
“En cas d’ignorance de la directive (…) la licence de l’organisation qui a été délivrée par ce ministère sera révoquée”, explique la lettre adressée aux ONG nationales et internationales.
La Suisse “surprise”
“Nous suspendons toutes nos activités à partir de dimanche”, a déclaré à l’AFP sous couvert d’anonymat un haut responsable d’une organisation internationale impliquée dans les opérations humanitaires.
Le coordinateur humanitaire de l’ONU pour l’Afghanistan, Ramiz al-Kabarov, l’a qualifié de “violation flagrante des principes humanitaires” dans un tweet. “La Suisse est choquée”, a réagi le Département fédéral des affaires étrangères (DFAE) sur Twitter. “Nous examinons les résultats des efforts humanitaires et demandons aux talibans de reconsidérer leur décision”, a-t-il ajouté.
“Cette décision pourrait être dévastatrice pour le peuple afghan”, a tweeté le secrétaire d’Etat américain Anthony Blanken, se disant “préoccupé par l’interdiction faite aux femmes par les talibans d’apporter une aide humanitaire vitale à des millions de personnes en Afghanistan”. .”
“L’Union européenne condamne fermement la récente décision des talibans d’interdire aux femmes de travailler dans les ONG nationales et internationales”, a déclaré Josep Borrell, porte-parole du chef de la diplomatie européenne, dans un communiqué transmis à l’AFP.
“Personnel Essentiel”
Amnesty International a condamné cette décision comme “une nouvelle tentative déplorable d’effacer les femmes de l’espace politique, social et économique”.
L’organisation non gouvernementale International Rescue Committee (IRC), qui compte plus de 3 000 femmes dans son personnel en Afghanistan, s’est dite “choquée”. “Notre personnel féminin est essentiel à l’acheminement de l’aide humanitaire en Afghanistan”, a-t-il ajouté sur Twitter.
Des dizaines d’ONG nationales et internationales travaillent dans des régions reculées de l’Afghanistan dans de multiples secteurs et sont composées de femmes.
Un phénomène rare chez les hommes
L’annonce intervient quatre jours seulement après que le gouvernement taliban a décidé d’interdire indéfiniment aux femmes afghanes de fréquenter les universités publiques et privées du pays.
La ministre de l’Enseignement supérieur Nida Mohammad Nadeem a expliqué dans une interview télévisée avoir pris cette décision parce que “les étudiants qui vont à l’université (…) n’ont pas respecté les consignes concernant le hijab”.
“Le hijab est obligatoire dans l’islam”, a-t-il insisté, faisant référence à l’obligation pour les femmes en Afghanistan de se couvrir le visage et tout le corps.
Samedi, environ 400 étudiantes de Kandahar, berceau du mouvement islamiste radical, ont boycotté leurs examens et manifesté dans la rue en solidarité avec leurs homologues féminines. Un professeur de l’université Mirwais Nika a déclaré à l’AFP sous couvert d’anonymat que la manifestation avait été dispersée par les forces talibanes qui ont ouvert le feu en l’air. Les manifestations masculines sont rares en Afghanistan.
Multiplication des mesures drastiques
Malgré leurs promesses d’assouplissement, les talibans sont revenus à l’interprétation stricte de l’islam qui a marqué leur premier mandat au pouvoir (1996-2001).
Depuis 16 mois, les actions libertaires se multiplient, notamment contre les femmes progressivement exclues de la vie publique et tenues à l’écart des collèges et lycées.
En plus d’être privées d’éducation, les femmes sont également exclues de la plupart des emplois gouvernementaux ou payées pour rester à la maison. Il leur est également interdit de voyager sans un parent de sexe masculin et doivent porter une burqa ou un hijab lorsqu’ils quittent leur domicile. En novembre, les talibans leur ont également interdit de visiter les parcs, les jardins, les salles de sport et les bains publics.
Cet article a été publié automatiquement. Sources : ATS/AFP