
Les bras croisés, Noémie, 39 ans, avance courageusement. La jeune femme pose son talon sur la pointe du pied opposé et marche pas à pas le long de la ligne tracée au sol. Les chercheurs notent le nombre de pas qu’il fait sans bouger. Puis Noémie refait l’exercice les yeux fermés, un vrai challenge. Il est toujours chancelant, deux rendez-vous galants veillent sur lui.
Ce test est un test de classe pour les déficiences de santé. Noémie s’y est soumise dans le domaine de l’Université de Caen, début octobre, où se sont réunies une trentaine de patients volontaires, venus de toute la France. Pendant quatre jours, une batterie de tests a permis aux chercheurs d’évaluer leur parcours, leur capacité à marcher devant des obstacles, leur perception des angles, des distances et du temps, et leur capacité à résoudre diverses tâches cognitives. Leur densité osseuse a été mesurée, leur cerveau a été examiné par imagerie par résonance magnétique (IRM). Ils sont tous là souffrant, comme Noémie, d’une déficience du système vestibulaire.
Le système vestibulaire ? Le sixième sens est inconnu. Pourtant il a un rôle important dans le maintien de notre équilibre, la stabilité de notre regard, notre focalisation dans l’espace. Ressentir l’accélération ou la décélération d’un ascenseur, éprouver un virage serré dans une voiture, ressentent tous ce dont nous avons besoin. Elle intervient encore – mais, ici, ses effets sont plus nets – dans notre perception du temps, le rythme de notre sécrétion hormonale, la qualité de notre sommeil, nos os…
Peu importe, “On ne connaît sa présence que dans certaines conditions ‘pathologiques’, comme le mal de mer, l’alcoolisme, les vertiges”, confirmaient, en 2006, deux chercheurs du Collège de France, Werner Graf et François Klam. Est-ce parce que cette petite pierre de justice, exemple parfait des compétences d’ingénierie de la nature, est placée dans le labyrinthe de nos deux oreilles, à l’abri des regards ?
Différents types de capteurs
Gardien de notre équilibre, le système vestibulaire n’agit pas seul. Il a deux connexions importantes : le système visuel et la proprioception. Le septième sens, quant à lui, qui rassemble une panoplie de capteurs captant l’étirement et la pression, se répartit sur nos muscles, nos tendons et nos plaies. Ces moniteurs cachés transmettent les données de localisation de différentes parties de notre corps au cerveau. Enfin, notre cerveau intégrera les messages de trois systèmes – le vestibule, le système visuel et la proprioception. Et les transforme, après une lecture intelligente, en informations cohérentes. Par exemple, “ corps droit, tête tournée vers la droite ».
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