
23h45, le 29 octobre 2022
Pas de temps d’arrêt pour François Asselin. Le Président de la Confédération des Petites et Moyennes Entreprises (CPME) est formel : “C’est à ce moment-là que les PME jouent gros. » Pour près de 3,9 millions d’entreprises, les problèmes volent désormais en escadrons. Des factures d’énergie qui montent en flèche à l’inflation qui ronge leurs marges et aux entreprises qui commencent à s’effondrer. La dernière enquête de conjoncture du CPME réalisée en octobre, révélée en avant-première par le JDD, traduit bien une montée de l’inquiétude à ces trois niveaux. “Ces problèmes étaient déjà présents dans notre enquête de juillet mais ils se sont aggravés”prévient François Asselin, qui craint un risque systémique.
L’inflation incontrôlée et la hausse des prix de l’énergie ressortent clairement comme les deux drapeaux rouges de cette enquête. Qualifiée de “bombe à retardement”, la charge croissante de la facture énergétique est devenue centrale dans les prévisions budgétaires des chefs d’entreprise. Selon 21% des sondés, entre 2021 et 2022, le coût de l’énergie est passé de 3% à 41% du chiffre d’affaires et devrait peser jusqu’à 60% l’an prochain. Tsunami, et l’assurance pour près d’un manager sur deux (45%) que la hausse des prix aura un impact négatif sur les résultats de 2022. Pire encore, 87% ont le sentiment de ne pas pouvoir vraiment négocier avec leur fournisseur d’énergie lors du renouvellement de leur contrat. Pourtant, 18% d’entre eux souhaitent le faire avant la fin de l’année et 41% en 2023.
56% des propriétaires de PME rencontrent des difficultés pour s’approvisionner
Présenté jeudi par le gouvernement, le plan d’aide aux entreprises de 10 milliards d’euros avec son amortisseur électrique va dans le bon sens, selon le président de la CPME. “Cela apportera de la visibilité et de la simplicité par rapport à la fenêtre du plan de résilience de 3 milliards d’euros qui n’était utilisée que par 300 entreprises, il a dit. Mais nous ne connaissons toujours pas le coût d’atterrissage du nouvel appareil et les offres tarifaires que les énergéticiens vont nous proposer, ce n’est qu’alors que nous serons fixés. »
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Autre problème XXL pour 90% des dirigeants interrogés : la hausse générale des prix de leurs fournisseurs, et là encore le sentiment que ces derniers profitent de la situation. “Des volumes en baisse, des délais de livraison plus longs et des coûts plus élevés… Pour les fournisseurs, les PME sont une clientèle captive”, rappelle le président du CPME. L’enquête montre que 56% des chefs de PME interrogés rencontrent des difficultés pour s’approvisionner en matières premières ou en biens intermédiaires.

Principale difficulté : le coût (pour 87%), suivi des délais de livraison (pour 71%) et des quantités disponibles (pour 69%). Résultat : pour la moitié des managers interrogés (53%), les coûts de production ont augmenté de plus de 10%. Surtout, un tiers (31%) d’entre eux déclarent ne pas reporter la hausse de leurs prix de vente. « Leur pricing power est trop faible et lorsqu’ils tiennent compte de l’inflation, 43 % déclarent subir une baisse de la demande », poursuit François Asselin.
“On ne voit pas un départ massif et immédiat”, admet-on au CPME
Tout n’est pas noir dans les tableaux de bord des entrepreneurs. Leur prédiction pour la seconde mi-temps est certainement faible par rapport à la première mi-temps. Ils ne sont que 32% contre 42% à anticiper une amélioration de la situation de leur entreprise. “Mais ce n’est pas une catastrophe et on ne voit pas un départ massif et immédiat”nous admettons au CPME.
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Autre signe encourageant : ils sont plus nombreux à rechercher des solutions de financement d’investissement que des liquidités auprès de leur banque (31% contre 24%). Et plus souvent ils obtiennent une réponse satisfaisante à leur demande de financement (71% contre 50%). “Les banques continuent de prêter et le système des prêts garantis par l’Etat était un sauvetage”, reconnaît François Asselin. En fait, six gestionnaires sur dix ont utilisé les PGE.
87% des répondants estiment pouvoir tenir leurs échéances de remboursement. Et 99 % pensent qu’ils réussiraient s’ils pouvaient étaler leurs échéances sur quatre autres années. ” Mais pour cela, il faut une mesure qui évite la mise en défaut immédiate de la Banque de France., ajoute le leader, conscient de l’opposition de Bruxelles en raison de ses règles en matière d’aides d’État.“Nous arrivons à la fin des mesures d’endettement en faveur des entreprises et maintenant nous devons rembourser, poursuit François Asselin. En matière de bouclier tarifaire, le gouvernement a privilégié les particuliers plutôt que l’ensemble des entreprises quand, à l’inverse, le plan de soutien allemand de 200 milliards d’euros risque de provoquer un coup d’arrêt entre nos deux économies. »