
IL: Quel est le dernier livre que vous avez lu ?
VINCENT DELERME. Sur la tournée j’ai lu Dans les forêts de Sibérie de Sylvain Tesson et en même temps Autoportrait d’Edouard Leve et un livre japonais que j’avais déjà lu et adoré : Iro mo ka mo, couleur et parfum, d’Ito Naga. Le soir, après le concert, pour sortir de l’ambiance très agréable et des applaudissements de la salle, j’ai plus envie de regarder des choses loin de moi à la télé que de lire. Parce que le livre me relie à moi plus qu’autre chose.
IL: Quand et comment lire ?
VD : Je ne lis pas beaucoup. Un jour, tout le monde dans le métro était au téléphone. Au milieu se trouvait un jeune homme plongé dans un livre, et je me suis dit. “Quelle chance il a. Parce que même moi, qui aime les livres, je suis vite rattrapée par mes messages, les résultats de foot… Aujourd’hui, mais avant, je ne pensais pas que savoir lire était une victoire. Quand je suis dans un livre, j’ai l’impression de contrôler ma vie, et c’est un sentiment très fort.
IL: Une expérience de lecture idéale ?
VD : Vous parcourez une certaine distance en été et vous savez que le soir vous retrouverez votre livre là où vous l’avez laissé la veille, et cette sensation vous accompagne toute la journée. Par exemple, en vacances au Brésil, tu lis Maigret et soudain tu es à Paris.
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IL: Comment choisissez-vous vos livres ?
VD : Comme des disques, au toucher. Je regarde la pochette et la quatrième de couverture, comme je le dis dans la chanson de ce nom.
IL: Dans votre livre Comme une histoire, vous listez les disques que vous écoutiez le plus il y a vingt ans. A quoi ressembleraient les livres ?
VD Lorsque j’étais étudiant, j’étais fasciné par les publications du Dilettante. J’ai adoré leurs t-shirts conçus par le même créateur mais tous différents. J’en ai acheté beaucoup, souvent des textes courts, et notamment le livre d’Eric Holder In the Company of Women ; c’est ce livre sur l’étagère dans la chanson “Fanny Ardant et moi”. A l’intérieur se trouve un texte que j’adorais, “Anne Freux”, qui est très proche de mes préoccupations de l’époque, à Rouen : l’histoire d’une fille au lycée pour qui tout le monde a le béguin et avec qui tout le monde veut coucher. . Mais Holder rêve juste de marcher à ses côtés en tenant son vélo. C’est très sempe. Dominique Gauthier, directeur du Dilettante, a publié un recueil de chroniques après la disparition de Holder intitulé L’Anachronique. Ce fut un plaisir de le faire.
IL: À quoi ressemble votre bibliothèque et comment la rangez-vous ?
VD : J’avais l’habitude de vivre dans des maisons avec beaucoup de livres comme mes parents. Je lisais très peu, j’en prenais, mais l’important c’est qu’il y avait une sorte d’ambiance livresque. Dans ma bibliothèque, la littérature est organisée par éditeur, car j’aime avoir tous les POL côte à côte, ou pochettes… La partie la plus visible de ma bibliothèque est constituée de livres photo, car j’en fais plus. et plus, et puis j’aime que les gens puissent prendre une image.
IL: Bukowski est-il dans votre bibliothèque comme dans une de vos chansons ?
VD : En fait, je ne connais pas très bien Bukowski, ça fait partie des arnaques des chanteurs. Ce que j’ai voulu évoquer, c’est son personnage, ce qu’il incarne plus que son travail.
IL: Et le Modiano dont tu parles dans “Le Baiser Modiano” ?
VD : C’est une vraie chose, j’ai lu et j’ai beaucoup aimé. Je lui ai envoyé l’album avec une chanson sur lui, il m’a répondu par une lettre qui m’a beaucoup touché, car il parle de la rue Carpo, qui est un centre névralgique pour moi, où se trouve l’appartement de la mère de ma mère. Quand j’habitais à Rouen avec mes parents, il arrivait qu’on vienne chez lui pour déjeuner le dimanche et qu’on parte l’après-midi, et je me disais : un jour je me réveillerai le lundi matin à Paris.
IL: “Les lecteurs de Houellebecq font rarement un sapin de Noël”, chante-t-on. Et toi?
VD : J’ai beaucoup aimé Noël, ce qui est très rare. Ma théorie est que s’il n’y avait pas Noël, la période du 3 novembre au 2 mars serait très longue.
IL: Votre classique préféré ?
VD : « Le Petit Nicolas », de Sempe et Goschini.
IL: Quel livre a changé votre vie ?
VD : Aucun livre ou billet n’a changé ma vie. Peut-être un film, Dead Poets Circle, parce que j’avais le bon âge, 13 ou 14 ans. J’ai trouvé ce film très puissant, demandant, quelle est votre rime ? Vous êtes ici, vous êtes sur terre, c’est votre tour et qu’allez-vous apporter ?
IL: Quel livre recommandez-vous?
VD : L’actualité de la couture se lit rapidement. Cela a toujours été un critère important pour moi. Quand j’étais plus jeune, je n’achetais que des folios de catégorie 1, les plus courts. C’est pour cette raison, entre autres, que j’aime les romans d’Emmanuel Bernheim.
IL: Quel livre aimeriez-vous qu’on vous offre pour Noël ?
VD : Dernière Schnock, j’aime bien ce magazine, on y trouve pas mal de sujets pointus.
IL: Et si vous deviez garder un seul livre de vos 20 ans que vous racontez dans Comme une Histoire ?
VD : Dans la chanson, j’ai eu une sorte de rencontre idéale avec “Divine Comedy”, comme si c’était vraiment la musique que j’attendais. En littérature, j’ai éprouvé le même sentiment avec “Portrait d’une Anglaise” d’Alain de Botton. C’était un roman très sentimental et très analytique, j’ai bien aimé.
IL: Lequel des livres de vos parents Martin et Philippe Delerme préférez-vous ?
VD De ma mère, peut-être “Peut-être”, un livre aux nombreuses illustrations poétiques et légendes. Ma mère a une vision très étonnante des choses et du monde, c’est la personne de mon entourage qui a une extrême capacité de mélancolie et en même temps de joie de vivre, et on retrouve ce mélange dans ce livre. J’aime aussi le travail de mémoire qu’elle a fait sur sa grand-mère dans Se parler de Marguerite. De mon père je dirais “Mr Mouse ou Pit Metaphysics” et plus récemment “La Vie en relief”. Le titre dit tout ce que j’espère qu’ils m’ont transmis, vivre intensément les choses d’aujourd’hui, en se souvenant toujours de ce que nous avons traversé pour en arriver là.